Un roman n’est pas un mensonge, puisqu’il ne se présente pas comme la vérité, même s’il s’en donne les apparences. Il peut pourtant contenir plus de réalité qu’un témoignage, permettre de toucher à l’intime, de dire ce qui ne saurait être dit autrement.

Éditions Gallimard – 2020
Présentation éditeur :
Lola vit en Bretagne au-dessus du bureau de poste où elle travaille. Elle est jolie, sage et boiteuse. Elle ne désire rien et se dit comblée par son jardin. Dans son portefeuille, on ne trouve que des photos de son potager et, dans sa chambre, face au grand lit où elle s’interdit de rêver, trône une armoire de noces pleine des cœurs de ses ancêtres.
Dans la région d’Espagne où sont nées ses aïeules, quand une femme sent la mort venir, elle brode un coussin en forme de cœur qu’elle bourre de bouts de papier sur lesquels sont écrits ses secrets… À sa mort, sa fille ainée en hérite avec l’interdiction absolue de l’ouvrir. Des cœurs de femmes battent dans la vieille armoire de Lola. Ils racontent une histoire qui a commencé en Andalousie, il y a plus d’un siècle. Lola se demande si elle est faite de cette histoire familiale qu’elle ignore, si le sang des fables coule de génération en génération, s’il l’irrigue de terreurs et de peines qui ne lui appartiennent pas, mais agitent ses profondeurs. Sommes-nous écrits par ceux qui nous ont précédés ? Il faudrait ouvrir ces cœurs pour le savoir…
Un jour, l’un des cœurs éclate, libérant les secrets de son aïeule Inès Dolorès, ainsi qu’un plus petit cœur rempli de graines, d’où naîtront des roses au parfum envoûtant qui envahiront le jardin. Saura-t-elle se laisser porter par son désir, s’affranchir de la voix de son père qui lui a prédit un destin de solitude ?
Carole Martinez, formidable conteuse, habite ses récits comme personne. Elle libère ses personnages, morts et vivants, et nous embarque à leur suite dans un monde épineux et baroque où le merveilleux côtoie le réel et où poussent des roses fauves.
***
Ce qui avait germé là, c’était à la fois le pire et le meilleur, c’était des fauves, c’était nos cauchemars et nos rêves, nos folies de jeunes gens, nous avions baisé la terre ce soir-là et elle nous offrait ces fleurs pour nous encourager à revenir dans la glaise, à revenir y jouir ou y crever.
J’avais beaucoup aimé frôlé le fantastique, et rêver avec Le cœur cousu de Carole Martinez il y a quelques années déjà. J’ai donc ouvert avec plaisir les Roses Fauves.
Les Roses Fauves, c’est comme un long fil magique et envoûtant qui se déroule pour découdre et éventrer les cœurs cousus renfermant des secrets et bien rangés au fond de l’armoire bretonne de Lola. Ces cœurs de tissu brodés qui racontent l’histoire et les vies des femmes de la famille d’origine espagnole de Lola.
Les Roses Fauves c’est une histoire de transmission, mais de celles qui sont ensorcelantes. Des histoires de femmes qui se taisent et dissimulent leurs secrets sur des petits papiers enfouis dans un cœur en tissu. Des cœurs en tissu qui doivent rester fermer à jamais.
Encore une fois, j’ai été happée par l’écriture de Carole Martinez, elle m’a embarqué dans son récit entre réalité et onirisme, roman dans lequel elle est elle-même un personnage.
Car la construction des Roses Fauves est déroutante, j’ai cru rêver parfois, mais surtout j’ai voyagé parmi les mots et les cœurs d’étoffe. J’ai été ensorcelée par cette poésie aussi noire que mystérieuse et lumineuse.
Un roman comme un conte familial, brodé de liberté et de femmes, d’histoires du passé et du présent. Je ne regrette pas d’avoir ouvert les vantaux de l’imposante armoire bretonne de Lola et de m’être laissée entraîner dans le flot de tissus, de mots, de broderies fantastiques et merveilleuses.
Merci pour le lien 🙂
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